Si, en 2036 le ciel nous tombe sur la tête !
L'astrophysicien Jean-Pierre LUMINET envisage très sérieusement le risque qu'un astéroïde percute la Terre cette année -là. Il liste six solutions afin d'éviter le cataclysme.
En 2004, une équipe scientifique découvre l'existence d'Apophis, un astéroïde de 300 mètres de diamètre, qui pourrait entrer en collision avec la Terre, très exactement le 13 avril 2029. Une chance sur 37 que la catastrophe advienne, selon les calculs de l'époque, soit un niveau de risque jamais atteint jusqu'alors.
Fort heureusement, quelques semaines plus tard, les spécialistes ont affiné leurs prévisions et leurs calculs indiquent désormais qu'Apophis devrait, si tout se passe bien, passer à 42 000 kilomètres de notre planète.
Une bonne nouvelle, car l'impact d'un astéroïde de cette taille serait dévastateur. Rien de comparable avec les 200 débris de quelques mètres qui tombent chaque année sur la Terre. Le choc dégagerait une énergie 34 000 fois supérieure à celle qui frappa Hiroshima. Une paille !
Qu'il percute une zone habitée, et il anéantit un pays grand comme la France, provoquant au passage un hiver de plusieurs mois dans l'hémisphère concerné.
Qu'il plonge dans un océan, et il en résulte une vague de 170 mètres de hauteur -les simulations numériques sont précises - .
Apophis va croiser à nouveau l'orbite de la Terre en 2036. Et, tôt ou tard, lui ou un autre menacera notre planète.
Dans son dernier livre Jean- Pierre LUMINET, astrophysicien à l'Observatoire de Meudon, en région parisienne, explore les solutions possibles pour éviter le pire :
Astéroïdes : la Terre en danger (le Cherche Midi), sorti le 13 octobre, se lit comme un roman. De science-fiction ou d'anticipation ?
Solution n° 1 : recourir à l'arme nucléaire
A priori, le remède idéal. Celui -ci consiste à bombarder l'astéroïde avec une charge nucléaire adaptée – plusieurs mégatonnes tout de même – pour le réduire en morceaux. Mais ce qui semble simple sur le papier, l'est infiniment moins dans la réalité.
Il faut, au préalable, définir la puissance idoine. Puis fabriquer les dizaines de bombes nécessaires. On pourrait imposer un moratoire international et stocker ces explosifs dans un endroit sûr ? Quitte à ne les employer que des années plus tard.
Cette solution n'est pourtant pas exempte de risques : trop faible, la charge risquerait de réduire la cible en débris assez gros pour résister à l'entrée dans l'atmosphère. On imagine les dégâts de quelques kilos de roches hautement radioactives s'écrasant sur une mégalopole.
Solution n°2 : dévier le danger
L'idée est de faire exploser une charge à proximité de l'astéroïde et, ainsi, créer une onde de choc capable de modifier sa trajectoire. En principe, quelques dizaines de centimètres d'écart suffiraient pour que la Terre soit épargnée.
Problème : une fois déterminé ou et à quelle distance provoquer l'explosion - quelques millions de kilomètres« environ » - le délai d'intervention se compte en mois, voire en années. Pas sûr que les astronomes en soient capables ni que l'astéroïde leur en laisse le temps.
Solution n° 3 : « écorcher « l'astéroïde
Le principe est assez voisin du précédent, il s'agit d'enlever de la masse, donc de la matière, à l'astéroïde. Pour cela, il suffirait de provoquer une explosion en surface, avec une bombe à neutrons, par exemple, moins puissante qu'une arme nucléaire.
L'autre possibilité s'inspire de l'initiative de défense «stratégique (IDS)-ou « guerre des étoiles»- chère à Ronald Reagan, du temps où il était président. Le procédé consisterai t à utiliser un laser hyperpuissant, couplé avec un réflecteur de 800 mètres de diamètre positionné à quelques kilomètres de la cible, qui boosterait l'effet du laser. La surface de l'astéroïde s'échaufferait alors à environ 100 degrés et se mettrait à fondre. Les panaches de vapeur qui en résulteraient suffiraient à lui donner une poussée qui dévierait sa trajectoire.
Solution n° 4 : lui donner des ailes
C'est l'idée la plus poétique. Son principe ? Utiliser le «vent solaire », ce souffle -très faible-dû à la radiation émise par l'étoile qui régit notre système. Il s'agirait de fabriquer une voile ad hoc, de 200 000 mètre s carrés, par exemple, pour un astéroïde de 500 mètres environ. Puis de le transporter, de la déployer et de l'arrimer. Encore faudrait-il que la voile en question soit assez légère pour être véhiculée, et composée d'un matériau suffisamment fin et opaque.
Solution n° 5 : le peindre en blanc
Ce concept très sérieux repose sur un mécanisme physique appelé « effet Yarkovsky », du nom de l'ingénieur russe mort en 1902, qui a démontré qu'en modifiant la surface d'un objet, on modifiait également la réflexion de la lumière solaire. Et, donc, sa vitesse. Une couche de poussière de 1 centimètre suffirait, en blanc (du talc) ou en noir (de la suie) par exemple. Reste-le problème de la technique du transport de 250 000 tonnes de matériau nécessaires. En outre, on n'est toujours pas d'accord sur le choix de la couleur.
Solution n° 6 : le remorquer
La proposition la plus plausible, récemment avancée par Edward Lu et Stanley Love, deux astronautes de la Nasa. L'idée est d'envoyer dans l'espace un vaisseau spatial d'une tonne environ, et de le placer en orbite de l'astéroïde. A elle seule, la force d'attraction entre les deux « objets « suffirait à faire dévier l' »ennemi » de quelques centaines de mètres.
Techniquement on sait faire : en 2010, les américains ont placé en orbite leur sonde Near à proximité de l'astéroïde Eros, avant qu'elle n'aille se poser sur place. Ce dispositif pourrait être testé lors du prochain passage d'Apophys, prévu en 2029. Une sorte de répétition générale avant 2036.
Source : l ' Express, n° 3 200 du 31 octobre 2012, signé Vincent OLIVIER ; illustration : Ernesto NOVO : ldé
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